En ce dimanche d’élection et de confinement, nous tenions à publier un message de remerciement. Merci à tous les Gilets Jaunes qui ont fait le choix de venir manifester hier à Paris. Notamment ceux venus de province. Il ne s’agit pas de distribuer des « bons points » aux GJ présents et des mauvais aux absents. Évidemment que ceux qui n’ont pas voulu venir vu la crise sanitaire, avaient de très bonnes raisons et qu’il n’y a pas à les juger.

Mais nous nous devons de réagir face au déferlement de haine et de dénigrement que les GJ présents hier à Paris ont connu, accusés d’être des sauvages assoiffés de mort et sans aucune conscience collective, venus pour propager le virus dans la capitale.

Ce samedi à Paris, des dizaines de milliers de personnes se sont rendues dans d’énormes centre commerciaux, ont pris le métro, sont allés au cinémas… On pourrait compter plusieurs dizaines de rassemblements qui ont vu plus de personnes concentrées au même endroit, qui plus est, dans des espaces clos. Mais non, il faut cracher sur les GJ, les accuser de tous les maux.

Mais la réalité, c’est que les GJ présents dans les rues de Paris hier avaient bien plus de conscience collective et de soucis de l’autre que des centaines de milliers de parisiens.

Alors merci à vous d’être venus, malgré tout, dans cette dernière révolte avec le confinement.

L’objectif des Champs Élysées a rapidement été oublié au vu des forces en présence. La quasi totalité des GJ présents le matin sur les Champs s’est donc rapidement rabattue sur la manif déclarée. Une manif, comme prévu, totalement nassée de bout en bout par la police. Mais, malgré l’énorme dispositif répressif, les GJ présents ont réussi à résister. Le bilan est lourd, autant en blessés qu’en arrestations. Mais la détermination des personnes présentes a permis à cet acte 70 d’avoir un des cortèges les plus déterminé et courageux de ces derniers mois. Plusieurs fois, la police, la gendarmerie ou même les BRAV ont du battre en retraite. Malgré la nasse permanente, des actions offensives ont pu avoir lieu, y compris des manifs sauvages.

Évidemment, ce n’était pas le 14 mars que beaucoup attendaient. Mais la situation totalement inédite que nous vivons ne pouvait que fortement impacter cet événement. Le fait qu’il ait quand même eu lieu, et que les présents se soient montrés aussi courageux, ne doit pas être balayé d’un revers de main. Encore une fois, merci aux GJ qui, malgré tout, ont cru en cette journée, en ce mouvement.

Nous tenons également à préciser quelques points concernant cette journée du 14 et la place de CND dans cette journée :
Nous n’avons pas été à l’initiative de cette date. Nous l’avons relayée et appuyée depuis des mois, en publiant des textes ou des appels vidéos et en étant co organisateurs d’événements. Parce que nous sentions cette envie et cet espoir autour de cette date.

Dans la même logique, le choix des Champs Elysées n’est pas « notre choix ». Il émane de plusieurs groupes et pages. Nous l’avons clairement appuyé car nous étions convaincus de sa pertinence malgré les énormes difficultés d’un tel objectif.

Si les Champs n’ont pas été le terrain de lutte des GJ hier, ce n’est pas parce que CND et d’autres l’ont claironné sur les réseaux depuis des semaines. C’est principalement parce qu’il n’y avait pas assez de manifestants. Évidemment qu’il y avait un dispositif policier très important autour des Champs. Mais il était nettement moins important que lors des derniers gros appels parisiens. Surtout : il faut être particulièrement naïf pour penser que si aucun groupe ou média n’avait annoncé l’objectif des Champs, la préfecture aurait fait le choix d’un dispositif réduit sur ce secteur. Chaque samedi depuis plus d’un an, la préfecture déploie un dispositif très important autour des Champs. Qui plus est sur des appels nationaux. Enfin, le dispositif est désormais ultra mobile et réactif (notamment avec les voltigeurs).

Donc oui, c’est un échec de ne pas avoir réussi à occuper les Champs Élysées, même sur une courte période. Mais seuls ceux qui proposent et tentent des choses s’exposent à l’échec. Et sans audace, sans ambition, le mouvement GJ n’aurait jamais connu ses plus beaux actes.

Nous ne saurons jamais à quoi aurait ressemblé le 14 mars sans la crise du Coronavirus, sans les annulations des deux grosses marches (climat et contre les violences policières), sans les appels de figures GJ à ne pas venir manifester.

Ce que l’on sait, c’est qu’il y avait encore de l’espoir samedi, encore une étincelle. Et qu’il est triste de voir certains cracher sur cette étincelle.

L’avenir est plus que jamais incertain. Alors que le pouvoir n’a jamais été aussi violent et répressif envers toutes les luttes sociales, écolos et féministe, alors qu’il passe ses réformes en force à coup de 49.3, la crise du coronavirus(bien réelle et bien grave) lui donne une occasion en or de mettre toute ses colères sous un couvercle.

Reste à voir si, sous ce couvercle, les révoltes vont se noyer et s’éteindre. Ou si cela va réussir à couver, à bouillir… pour exploser lorsque le couvercle se rouvrira, dans quelques semaines.

Du côté de CND, nous serons toujours attentifs et respectueux des initiatives qui permettent de maintenir en vie l’espoir d’une vie meilleure, d’une société plus juste et plus respectueuse du vivant sous toutes ses formes. Cela passera encore par des prises de position, par des soutiens à des événements, des appels, des occupations, des gréves. Peut-être aussi par des formes nouvelles de collaboration et des constructions d’entraide dans une société confinée. Toutes ne seront pas couronnées de succès. Mais toutes seront utiles pour ne pas abandonner et sombrer définitivement dans une société autoritaire et individualiste.