L’interdiction de diffuser les actions de la police centralise toutes les craintes, mais légaliser les drones et les technologies de surveillance porte tout autant atteinte aux libertés et à la démocratie. Deux ans jour pour jour après le début des gilets jaunes, le 17 novembre, ce texte sera examiné dans une Assemblée Nationale acquise à LREM et ses projets les plus autoritaires. Qu’en est t’il de cette « loi sécurité globale » ?

Drones, reconnaissance faciale et identification permanente des individus

C’est un sujet peu abordé et qui pourtant nous concerne tous. Le texte prévoit dans ces interstices de légaliser la reconnaissance faciale dans l’espace public et l’exploitation en temps réel des informations sur les personnes. Le flux de vidéo serait traité en direct par le commandement de la police, comme le mentionne l’article 22. Le texte ne fait pas mention du terme « reconnaissance faciale », mais il faut noter que tous les amendements visant à éclaircir la pratique ont été rejetés. C’est l’exemple de l’amendement n°CL340 qui prévoyait explicitement l’interdiction de la reconnaissance faciale. Rejeté ! L’esprit de cette loi est de mettre la totalité de l’espace public (des villes surtout) sous contrôle permanent. Sans angle mort, avec toute la technologie des algorithmes et leurs usages liberticides dans la collecte de données et ce de manière quotidienne.

La maitrise du récit officiel

L’Etat a perdu la bataille sur les violences policières depuis les gilets jaunes, notamment par la profusion d’images mises à la portée de tous sur les réseaux sociaux, devenus de véritables auto médias pour tout individu ou collectif qui y trouve enfin une voix.

Le but de cette loi, qui prévoit 1 an d’emprisonnement et 45 000€ d’amende pour la diffusion « portant atteinte à la police » est de limiter les libertés d’expression pour redevenir maître d’un récit républicain totalement écorné. Pour retrouver un discours hégémonique, les centaines de violences arbitraires, le racisme quotidien, l’impunité quasi permanente, ainsi que la sale besogne qu’effectue la police pour le compte de Etat sont devenus des réalités qu’il faut à tout prix cacher.

Aujourd’hui les forces de l’ordre intimident déjà régulièrement les journalistes professionnels ou simples témoins qui filment. La police exerce déjà une pratique de jugement à l’emporte-pièce sur le terrain par le biais des violences physiques et psychologiques qu’elle exerce. Imaginez son zèle si cette loi passait… Si l’Assemblée Nationale conférait encore plus de pouvoir à ceux qui en abusent déjà en toute impunité…

La manifestation de la vérité, thème si cher à la justice prend du plomb dans l’aile

Sans image, combien de crimes et de violences auraient été étouffés ou ne seraient même pas parvenus aux portes d’un tribunal ? Des juges eux même le disent : les images sont utiles et sans elles, c’est toujours la version policière qui gagne.

Rappelons-nous l’importance qu’ont eu les images pour plusieurs affaires :

  • Pour comprendre ce qui est arrivé à Cédric Chouviat, la vidéo d’un automobiliste a permis de contredire la version policière qui était en train de construire un gros mensonge pour se dédouaner alors qu’elle venait d’étrangler et tuer un homme, images à l’appui.
  • Il en va de même pour Geneviève Legay, pour le contexte de la mort de Steve Maïa Caniço, ou pour Théo.

Floutage de gueule

Cette loi pose aussi un problème technique majeur. Implicitement, elle signerait la fin des vidéos en direct montrant des policiers. Si dans leur grande mansuétude de playmobils faussement naïfs les députés LREM ont suggéré le floutage des visages de policiers, rappelons qu’il est à l’heure actuelle impossible de flouter des visages en temps réel. Et que de manière générale, flouter un visage en vidéo est une technique compliquée qui n’est pas à la portée de tous et qui restreindrait de fait beaucoup d’images. Si toutefois on se tenait au respect de cette loi abjecte…

 

Dernier point, non des moindres, il faut noter que les policiers ne sont pas inquiétés par la diffusion de leur visage qu’ils ont déjà pris l’habitude de masquer depuis longtemps (ainsi que ne pas porter leur matricule), et bien qu’on ait vu des actes barbares commis par leurs soins, cela n’a à ce jour pas fait l’objet de représailles populaires. L’argument de la protection des policiers n’est basé sur rien et constitue surtout une esbroufe faisant passer les oppresseurs pour les oppressés.

Il faudrait se pencher sur d’autres aspects de la loi, comme l’extension du port d’arme dans les lieux publics, même hors service, ou l’augmentation du rôle des sociétés privées dans le rôle de police.

Ce qui est frappant dans ce texte qui passera le 17 novembre à l’Assemblée Nationale, 2 ans jour pour jour après le début des gilets jaunes, c’est son aspect martial. Prenons-nous bien conscience que dans une même loi sont mis en vis à vis une réponse d’Etat face à la contestation sociale et une contre le terrorisme ? Cette loi entend gérer globalement ces problèmes de la même manière.

Des rassemblements auront lieu le 17 novembre pour s’opposer à cette loi :

  • A Paris, devant l’Assemblée Nationale à 18H
  • A Marseille, devant l’Église des Chartreux à 18H
  • A Lyon ,devant l’Hotel de Préfecture à 18H
  • A Chalon sur Saône, Place  de Beaune à 18H
  • Au Mans, devant la préf à 18H
  • A Nice, devant le Palais de Justice, 18H
  • A Rennes, place de la République, 10H30
  • A Bordeaux, parvis des Droits de l’Homme, 18H

 

rassemblement la loi sécurité globale devant l'Assemblée Nationale