La preuve par la Palestine

Que nous disent les événements en Palestine sur l’évolution du champ politique français ?
Entre interdictions de manifestations, répression violente, propagande médiatique et un tapis rouge déroulé à l’extrême-droite, le traitement du mouvement de solidarité envers la Palestine nous en dit long sur la fascisation de la France.
Le samedi 7 octobre 2023, le Hamas lançait une offensive sans précédent sur le sol de l’Etat colonial israélien. Celle-ci s’est soldée par une tuerie de masse qui a suscité de vives réactions à travers le monde.
De nombreux pays ont exprimé leur ferme condamnation, tout en affirmant leur soutien total à Israël. La France fait partie de ceux-ci.
Aux côtés des Etats-Unis, elle ne s’est pas contentée de présenter son soutien et ses condoléances aux familles des victimes israéliennes, elle s’est fermement rangée derrière Israël et Netanyahou. Le jeudi 12 octobre, Macron est même allé jusqu’à légitimer l’horreur de la répression à Gaza, dont les morts se comptent aujourd’hui par milliers.
En parallèle, les manifestations de solidarité avec la Palestine sont interdites, des dizaines de militant·es sont interpellé·es, y compris jusque dans les rangs de l’Union Juive française pour la Paix, simplement pour avoir témoigné de leur soutien au peuple palestinien ou de leur indignation face à la tragédie qui se déroule à Gaza.
Des représentants du gouvernement et des journalistes se permettent des sorties toujours plus islamophobes. Le RN, parti politique dont les fondements même reposent sur la culture du racisme, en particulier de l’antisémitisme, est désormais considéré comme tout à fait respectable, appartenant à ce que le gouvernement et les médias appellent sans honte « l’arc républicain ».
Ce n’est pas un hasard, si le révisionniste Éric Zemmour a bénéficié d’un bain de foule lors de la manifestation organisée par le CRIF tandis qu’Olivier Faure, leader du PS, en a été expulsé. Face à cela, la France insoumise, dont nous devons reconnaître que les positions nous ont surpris, dans le bon sens du terme, se tient plus seule que jamais à l’Assemblée.
Elle fait face à un déferlement médiatique, politiquement confus, d’une ampleur rarement atteinte, qui présente la gauche comme étant un danger à combattre et même une complice du terrorisme. En 75 ans de résistance palestinienne, jamais la France n’avait été aussi partiale, que cela soit dans sa communication internationale ou dans sa politique intérieure.
Dominique de Villepin, qui n’a pourtant rien d’une personne sympathique, nous a justement donné un aperçu de ce qu’était la politique française d’il y a vingt ans vis-à-vis de la situation au Proche-Orient. Aussi imparfaite soit-elle, celle-ci considérait les aspirations du peuple palestinien à la liberté et se voulait plus neutre. Aujourd’hui tout cela n’existe plus.
Nous devons nous interroger sur le soutien idéologique du gouvernement Macron à un régime coloniale d’extrême-droite.
La France s’est définitivement rangée du côté des USA et de l’Atlantisme au point de compter parmi les quatre nations ayant voté contre la résolution du Conseil de sécurité appelant à un cessez-le-feu.
Mais qu’a-t-elle à y gagner ?
Les crimes du Hamas sont l’occasion rêvée pour le pouvoir et les médias à sa botte.
Depuis dix jours, ils sont utilisés pour légitimer des déclarations plus racistes les unes que les autres, pour justifier la mise en place de nouvelles politiques autoritaires, xénophobes et islamophobes.
La mort de plus d’un millier d’enfants gazaoui·es est considérée comme résultant d’une riposte légitime, les Palestinien·nes sont déshumanisé·es, au point que la colonisation et les dizaines de milliers de victimes qu’elle a engendré en 75 ans semblent être un non-sujet.
Les dernières organisations de gauches qui tiennent péniblement le cap sont criminalisées, le NPA et l’UJFP sont menacés par des actions en justice pour « apologie du terrorisme » alors que dans un même temps le gouvernement français se dit solidaire d’un Etat qui a tué plus de 3000 civil·es en l’espace d’une semaine et qui est en train d’en affamer deux millions d’autres.
Plus que jamais les événements en Palestine mettent en évidence la puanteur du climat qui règne en France. On se sert des actions du Hamas et de la surenchère de quelques égarés qui soutiennent encore l’Etat islamique pour justifier d’une véritable haine à l’égard de tout ce qui se rapproche de près ou de loin d'un·e arabe ou d’un·e musulman·e.
Climat qui annonce une fois encore que le pire est à venir, et qu’il nous faudra être plus solidaires que jamais pour y faire face.
Ce qui semble difficile quand on voit le peu d’organisations se disant de gauche qui sont en capacité de tenir une ligne claire sur l’antiracisme et la lutte décoloniale. Qu’importe, les récents événements nous auront permis d’identifier clairement nos allié·es.

Palestine : la gauche française dans le déni du colonialisme

Comme à chaque sursaut de la guerre en Palestine, toute une partie de la gauche (de concert avec la droite) s’est empressée de condamner les violences dans leur ensemble, tout en appelant au calme et au dialogue.

On ne s’en étonne plus. Des dizaines voire des centaines de Palestiniens meurent chaque années sous les balles israéliennes, et ce dans l’indifférence généralisée de la communauté internationale. Et pourtant, à chaque riposte palestinienne, nous assistons aux sempiternels appels au calme, que l’on assène au peuple palestinien depuis plus de 75 ans.

Existe-t-il vraiment des gens qui s’étonnent qu’après tant d’années les Palestiniens ne croient plus au fameux « dialogue » ? Sept décennies qu’ils vivent sous le joug colonial de l’Etat d’Israël. Sept décennies que cet Etat leur refuse la moindre humanité.

Cette fois-ci le Hamas et plusieurs groupes armés sont à l’offensive. Et qu’importe que l’on adhère ou non aux différentes idéologie qu’ils portent, la guerre qu’ils mènent est juste. Comment pourrait-il en être autrement d’une guerre de libération ?

Car il convient ici d’insister sur un point. Les deux opposants ne sont pas sur un pied d’égalité. Il existe bel et bien un colon et un colonisé. Un oppresseur et oppressé. Un peuple qui se bat pour la liberté, et un Etat qui tue pour maintenir un régime d’apartheid.

Condamner la violence dont usent les Palestiniens c’est bafouer la mémoire de tous ceux qui sont tombés sous les balles de Tsahal, c’est cracher à la figure d’un peuple qui se bat fièrement et qui refuse de poser le genou à terre malgré des décennies d’oppression et d’indifférence de la part de l’Occident.

Comme tout le monde, nous déplorons les victimes de ce conflit. Il n’empêche que ces gens qui s’empressent de condamner les violences sont en partie responsables de la situation. Quelle autre solution le peuple palestinien a-t-il, quand ses souffrances sont ignorées de tous et qu’entretenir des relations diplomatiques ou économiques avec un Etat comme Israël est considéré comme normal ?

Aucune, il ne peut compter que sur lui-même. Et une chose est sûre, après sept décennies de beaux discours et de traités bafoués dans l’indifférence la plus totale, sa libération passera nécessairement par les armes.

Enfin, rappelons que n’est pas innocent celui qui considère comme normal, ou acceptable, le régime d’apartheid exercé par l’Etat israélien, et qu’une condition de civil n’enlève rien à un statut de colon.