Depuis le début du mouvement, les médias et le pouvoir ne cessent de salir et d’insulter les Gilets Jaunes : racistes, assoiffés de violence, homophobes, sexistes, vulgaires… Même si de plus en plus de monde se rend compte de la malhonnêteté de ces manœuvres, à l’image des 1 400 artistes et de l’appel « nous ne sommes pas dupes », ce travail quotidien de discrédit depuis six mois laisse des traces. A tel point que certains citoyens n’osent pas sortir en centre-ville le samedi, ou que des personnes en lutte (enseignants, hospitaliers…) ne veulent pas se joindre à des actions de GJ de peur que cela soit trop violent. Bien sûr, il y a la peur des gaz et des charges policières. Mais pas que. Quelque chose reste dans l’inconscient collectif.
Et pourtant. Si violence il y a eu lors de quelques actes depuis 6 mois, cela ne reflète clairement pas l’essence du mouvement. Un mouvement avec tellement de belles choses, de belles personnes et de beaux moments. Alors, même si ce texte ne pourra pas rééquilibrer la balance générale, voici une déclaration d’amour aux Gilets Jaunes et à leur beauté !
Que c’est beau de voir des personnes si différentes se réunir dans la rue. Jamais nous n’avions vu une telle diversité dans un mouvement social. Que c’est beau de voir des juifs manifester avec des musulmans, des catholiques et pleins d’athée. Beau de voir un mouvement social avec autant de femmes dans les rues, dans les assemblées, sur les ronds-points.
Si beau de voir des personnes ne pas reculer face aux armes de terreur de la police : canon à eau, gaz, flashball. Des personnes en fauteuil roulant ou en béquilles, qui reviennent, acte après acte, malgré la violence de la police. Des personnes pour qui chanter « révolution » ou « ça va péter » n’est pas du folklore syndical mais bien une menace face à un pouvoir abject. Des gens pour qui construire une France Insoumise n’est pas qu’un slogan politique.
Tellement sublime de voir des milliers de personnes chanter sous les lacrymo ou dans une nasse, avec la joie de vivre et d’exister. Voir des personnes âgées échanger avec les plus jeunes générations, et nous surprendre par leur rage et leur courage, que certains prennent pour un manque de sagesse !
Quel plaisir de voir se créer des assemblées. Puis des assemblées des assemblées. Sans que ces groupes ne tentent de parler au nom de tous, et sans qu’aucun individu ne soit mis en avant. C’est une première de voir un mouvement national, rassemblement de dizaines de milliers de citoyens, avancer et créer de façon totalement décentralisée et horizontale. En 26 semaines, les GJ ont réalisé bien plus d’actions, d’occupations, de débats, de manifestations que les structures de l’époque d’avant, et ce, sans leader ni organe centralisé. Putain que c’est beau.
Que c’est beau de voir tant d’ingéniosité pour réinventer la lutte, semaine après semaine : actions sur les péages, occupations de ronds-points, manifestations sauvages, fanfares, créations de cabanes, blocages d’entreprises et d’institutions, barbecues, sit-in…
Que c’est beau une vitrine de magasin de luxe défoncée avec écrit « on prend l’isf à la source ». Que c’est beau un 1er décembre qui fait vraiment flipper Macron, le Medef et tous les « puissants ». Que c’est beau une manif sauvage qui fait enfin revivre une ville et qui nous fait sentir puissamment réel.
Et bien sûr, que c’est surprenant et vivifiant de voir qu’autant de GJ ne lâchent pas, malgré 6 mois de mobilisation et un pouvoir toujours aussi muet et méprisant. Une telle endurance dépasse tous les schémas connus des luttes sociales « classiques ». Et c’est déjà une victoire extrêmement importante. Une victoire qui ne se voit pas et qui portera ses fruits dans quelques mois, et ce, pour plusieurs années. Des dizaines de milliers de citoyens se sont éveillés et ont construit de nouveaux modes de pensée, de luttes et d’existence. Qu’importe comment se terminera ce mouvement, il ne se terminera finalement pas vraiment. Pas de retour à la normale possible pour ceux qui se sont réveillés et qui voient désormais le pouvoir politique comme l’instrument de domination des plus riches, et la police comme un instrument de contrôle de ce pouvoir.
Enfin, la beauté première de ce mouvement, c’est l’amour qui se dégage chez ces milliers de Gilets Jaunes. L’amour pour la lutte. L’amour pour la vie. L’amour pour les autres. Les rencontres lors des AG ou des manifestations. Les fous rires. Les amitiés naissantes. Tellement d’amour. Tellement de vie.
Alors oui, mille fois oui, vous êtes tellement beaux ! Ne l’oubliez jamais.
Crédits photos : Julien Gidoin
4 Commentaires
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Merci pour votre soutien aux GJ de France et d’ailleurs.
Merci, de faire surgir la vérité sur le fond solidaire et fraternel des GJ, de tous et de toutes.
Ceux qui descendent dans la rue week-end après week-end ou même jours de semaines.
Ceux qui occupent les ronds-points de leurs départements.
Ceux GJ handicapés(es) qui ont une force exemplaire.
Ceux qui pour des raisons X ou Y font un travail de résistance en sous-marin et ne peuvent aller en manifestations.
Merci à Cerveaux Non Disponibles d’être Disponible pour les GJ
<3
Texte magnifique, bouleversant quand on vit ce mouvement de l’intérieur, face aux violences protéiformes dont il est l’objet. Juste merci du fond du coeur tellement c’est beau et vrai. « Putain que c’est beau ».
Putain, oui.
Cet élan spontané, imprévisible qui est né le 17 novembre et s’est transformé en quelque chose de magnifique, qui nous dépasse.
C’est un renouveau, un souffle de vie, un espoir – inextinguible.
Comme beaucoup j’étais complètement désespéré, je n’avais aucune illusion sur l’impasse dans laquelle nous nous trouvions, aucun espoir sur le fait que quoi que ce soit puisse advenir.
Et finalement… Finalement !
J’ai vu dans ce mouvement bien plus d’humanité, d’amour, de rires et de sourir, de sagesse, de détermination, de dignité que dans une vie à observer le monde politico-médiatique en état de mort clinique, ce monde du faux, du mensonge, de l’iniquité vomit à travers nos télécrans chaque jour.
Chaque semaine il a fallut braver l’apathie, la résignation, la météo, les contrôles… puis les gaz, les tirs, les coups, les canons à eau.
Mais chaque semaine je n’aurais voulu être nulle part ailleurs qu’avec vous. Avec nous.
A nous !
Merci, c est si facile de l oublier 🙂