La guerre menée par Israël au sud Liban a franchi un cap.
Depuis le 8 octobre 2023, le Hezbollah avait ouvert un front de soutien à la bande de Gaza.
Voilà que depuis une semaine, le gouvernement israélien a décidé d’envoyer sa force de frappe la plus lourde sur le pays, alors que seule la ligne de front au sud était auparavant impactée.
Israël a lancé les hostilités de la plus crade des manières.
Par un acte qui, s’il avait été mené par n’importe quel autre pays, armées, régulières ou non, aurait été ardemment dénoncé par la communauté internationale.
Le 17 septembre, plus de 5 000 bipeurs, appartenant – théoriquement – aux membres du Hezbollah, explosent dans tout le pays : rues, supermarchés, écoles, lieux de travail, lieux de résidence en famille, hôpitaux.
Des centaines de milliers de Libanais voient, autour d’eux, des individus exploser littéralement.
Dire qu’il s’agit d’un acte terroriste pourrait nous faire valoir des censures et des condamnations. Nous dirons que c’est un acte de terreur de masse.
Le lendemain, une nouvelle salve avec des talkies-walkies, des téléphones portables et d’autres appareils de transmission.
Il y aura des dizaines de morts et des milliers de blessé•es graves : mutilations, perte de l’ouïe ou de la vue.
l’État d’Israël a avec cette opération réussi un « coup de maître » : il a paralysé les communications du Hezbollah, tétanisé l’ensemble de la population par la surprise et l’ampleur de la première vague d’explosion, mais surtout lors de la deuxième salve, ou il a montré que TOUT était devenu une potentielle bombe.
Qui n’a pas depuis cette date regardé son téléphone sans se demander si …. : Voilà la terreur.
Mais surtout, il a restructuré les manières de faire la guerre par une nouvelle technique héritée de la triple décennie de terrorisme. Il a créé, du jour au lendemain, des milliers de petits kamikazes involontaires, dont elle a pris le contrôle.
Au lendemain de ces deux journées, la guerre s’amplifiait. Pendant deux nuits à partir du jeudi suivant, l’armée israélienne a bombardé le sud du Liban avec une intensité jamais vue depuis le 8 octobre.
Israël revendique des «douzaines» de frappes, qui ont touché de manière indiscriminée des dizaines de villages. En parallèle, le gouvernement fasciste israélien a multiplié les menaces et déclaré que «le centre de gravité de la guerre s’était déplacé vers le nord» et qu’Israël était «entré dans une nouvelle phase de la guerre».
La capitale libanaise, Beyrouth, a elle aussi de nouveau été bombardée. Près de 600 personnes sont mortes ces dernières 48h dans des bombardements atteignant tout le pays, dont beaucoup de civils. Netanyahu vise manifestement à faire des territoires environnants des zones inhabitables. Il attaque avec une froideur et une rationalité militaire digne des plus grands dictateurs de l’époque contemporaine.
Le ministre israélien de l’Éducation, Yoav Kish, a menacé en direct à la télévision israélienne, de rayer le Liban de la carte : «Il n’y a aucune différence entre le Hezbollah et le Liban. Le Liban sera totalement annihilé. Il cessera d’exister c’est ce que nous voulons».
Anthony SAMRANI écrit ainsi dans l’Orient le Jour:
« Cette guerre nous met face à une équation impossible. On ne peut pas soudainement oublier ce qu’est le Hezbollah. On ne peut pas le confondre, comme le fait le gouvernement israélien, avec le Liban, bien qu’il en fasse partie, qu’on le veuille ou non.
On ne peut pas faire comme si ce n’était pas lui qui avait ouvert un front de soutien à Gaza le 8 octobre dernier, prenant le Liban en otage des calculs de l’axe iranien.
On ne peut pas fermer les yeux sur tous ses coups de force, sur toutes ces fois où Hassan Nasrallah a menacé de déclencher une guerre civile, sur tous les assassinats dans lesquels il est accusé – non sans raison – d’avoir joué un rôle majeur, sans parler de son implication probable dans l’importation et le stockage du nitrate d’ammonium qui a explosé le 4 août 2020.
On ne peut pas non plus oublier que le sort des civils était le cadet de ses soucis quand il commettait les pires crimes de guerre pour permettre à son allié syrien de survivre.
Mais en face, c’est Israël. Israël qui a détruit Gaza, qui a tué des Palestiniens par dizaines de milliers, qui occupe et met le feu à la Cisjordanie et qui promet le même sort au Liban.
On peut vouer le Hezbollah aux gémonies, ce sont bien des Libanais, quelle que soit leur communauté, qui sont et vont être tués par l’armée israélienne. C’est bien le Liban qui sera détruit si le Hezbollah est défait.”
Netanyanu a par ses actes, enfermé aussi bien les palestiniens de Gaza et de Cisjordanie que la population libanaise, dans un « tout. »
En revendiquant que “le Hezbollah et le Liban c’est la même chose” le gouvernement israélien et son armée effectuent une “prophétie auto-réalisatrice” : Plus on dit quelque chose, plus on agit d’une certaine manière de façon à ce que celle-ci devienne vraie.
Le Hezbollah était pourtant loin d’être hégémonique. Lors de la « Thawra » (révolution) qui commença en 2019 et qui fera tomber le gouvernement Saad Hariri, les Libanais, massivement dans la rue s’opposaient – sous le modèle du Hirak algérien – aux élites politiques et à la corruption. La plupart des chiites affiliés au Hezbollah ne descendirent pas dans la rue. Et la jeunesse libanaise réclamait la fin des accointances entre le régime et l’Iran portant atteinte à la souveraineté libanaise.
Dès le premier jour de l’insurrection, les bureaux et les résidences de responsables du Hezbollah et du mouvement Amal ont été pris pour cible par des manifestants à Nabatiyé. 13 jours plus tard, le gouvernement fut renversé.
Depuis 5 ans, le pays renforce son instabilité économique et politique. La pandémie de Covid et les explosions au port de Beyrouth dont le Hezbollah est responsable ont mis le pays dans une situation invivable. La légitimité de l’État c’est effondrée à tel point qu’aujourd’hui, la parole de ce dernier n’existe pratiquement pas.
Le Hezbollah s’est lui renforcé, et Tsahal se sert de ça pour attaquer l’ensemble du pays de manière indiscriminée.