Initialement publié le 24 février 2020
Appel aux groupes Ultras à rejoindre la lutte.
Depuis plusieurs mois, la France est secouée par de nombreuses révoltes : Gilets Jaunes, climat, retraites, lycées, avocats, pompiers…la liste est longue et ne fait que grossir.
Il existe deux point communs à ces revendications :
1/ La réponse du pouvoir, toujours la même : réprimer et terroriser.
2/ L’idée de plus en plus répandue que la solution réside dans un changement total du système. Une Révolution.
Face à cette situation, le mouvement ultras français est pour le moment resté en retrait. Présentée depuis toujours comme une évidence en France, cette volonté de ne pas agir en dehors du cadre footbalistique n’est pourtant plus de mise dans de nombreux pays où les révoltes ont été les plus importantes : Tunisie, Chili, Turquie, Algérie, Brésil…
Les Ultras ont été parmi les premiers à expérimenter les dérives totalitaires du pouvoir : les nouvelles techniques pour gérer les foules (caméras, lacrymo, flashball) mais aussi les nouveaux « outils » législatifs pour restreindre les libertés individuelles sans avoir à passer par un juge. Ainsi, les interdictions de manifester que des milliers des Gilets Jaunes ont subies ne sont que la déclinaison des interdictions administratives de stade que les Ultras connaissent depuis plusieurs années. Aujourd’hui, on parle de reconnnaissance faciale dans certains stades français. Le pouvoir teste ainsi son délire autoritaire et fascisant sur une partie de la population que peu de gens soutiennent, parce que présentés comme violents et beaufs par les médias mainstream. Ce faisant, il peut ensuite décliner ses outils quelques années plus tard sur d’autres populations… Pour finir par les utiliser sur l’ensemble des citoyens.
La violence policière, les restrictions de liberté, la justice aux ordres du pouvoir…. toutes ces dérives ont donc été vécues par le milieu ultra. Pourquoi ? Parce qu’il dérange par son autonomie et sa force d’opposition. L’autonomie d’un groupe ultras est quelque chose qui fait peur : au club, à la ligue, à la préfecture, au pouvoir. Des centaines de supporters qui s’organisent entre eux, en toute liberté, sans qu’on puisse leur mettre de pression financière ou autre, c’est quelque chose d’inacceptable pour le système actuel qui a plus que jamais besoin de contrôler. Contrôler tout le monde, tout le temps.
Le tournant sécuritaire dans les stades et la répression contre les groupes ultra vont de pair avec la néo-libéralisation marchande du football : dès qu’il y a un tournant néo-libéral, il y a un tournant répressif. C’est ce qu’on a vu avec Thatcher et c’est ce qu’on voit actuellement avec Macron. C’est le cas dans les stades comme partout ailleurs. Dans le foot, les enjeux marchands et politiques sont tels que les autorités ont besoin de stades aseptisés où les supporters ne sont finalement plus que des spectateurs, et surtout, où ils sont totalement dociles.
Pour réussir à réprimer de façon aveugle et injuste le mouvement ultra, les autorités ont stigmatisé une population déjà fortement dénigrée par les médias et les « classes dominantes ». Traités de sauvages, de barbares, d’assoiffés de violence… il a alors été facile de les condamner et de les terroriser.
Une méthode que l’on a pu revoir ces derniers mois avec les Gilets Jaunes, eux aussi traités de barbares et de sauvages. Mais au fond, eux aussi craints par le pouvoir en raison de leur autonomie et de leur liberté d’action et de pensée.
En 2020, la question n’est plus d’être en jaune, en vert, en rouge ou en noir. La question est d’être dans la rue et de résister. Une rue que le pouvoir totalitaire a totalement confisquée, au point d’embarquer toute personne osant manifester en dehors des « nasses mobiles » mises en place par la préfecture.
Le 14 mars, de nombreux collectifs d’horizons très divers appellent à venir sur Paris pour reprendre cette liberté et pour aller encore plus loin. Il est question de réforme des retraites, de justice climatique, de pouvoir d’achat, de liberté d’expression et de circulation, de violences policières et d’Etat…. Des GJ, des écolos, des syndiqués de base, des étudiants, des avocats, des pompiers… toute la France qui lutte est appelée à venir sur Paris ce jour là.
C’est pourquoi nous formulons le vœu que les Ultras sortent des stades et se mobilisent avec le reste de la société. En commençant par cette journée du 14 mars à Paris. Car les Ultras ont des pratiques et une expérience qui pourraient être utiles dans ce combat face à un pouvoir violent et autoritaire. Des chants aux fumigènes en passant par les chorégraphie, l’univers ultras influence déjà les lutte sociales mais pourrait aller encore plus loin. Surtout, les ultras d’un même groupe ont une force précieuse qui découle de leur solidarité, de leur détermination et de leurs capacité à agir de façon très groupée et rapide. Lorsqu’un ultra est pris à parti par des policiers, aucun membre de son groupe ne reste passif et/ou ne filme la scène. Tous les membres de son groupe viennent l’aider et opposent une résistance. Cet esprit de groupe et de résistance font des ultras une force d’opposition réelle au pouvoir et à son bras armé. Ces groupes, dans la rue avec les GJ, les BB et autres militants qui veulent vraiment changer les choses, pourraient devenir décisifs.
En Tunisie ou en Egypte, les Ultras ont joué un rôle important dans les révolutions de 2011. Les ultras turcs ont également su mettre leurs différents de côté au moment de la révolte de la place Taksim. Plus récemment, à Alger, les diverses communautés ultras d’Alger se sont déclarées khawa (« frères »), mettant entre parenthèses leurs rivalités sportives pour unir leurs forces contre le régime. Ils participent régulièrement aux manifestations du vendredi. Au Chili également, les groupes de supporters des trois grands clubs de Santiago ont appelé à manifester, mettant de côté leurs inimitiés.
En France, nous pensons qu’il serait salutaire pour le mouvement social que les Ultras prennent position et aillent aux côtés de ceux qui combattent ce pouvoir de plus en plus autoritaire et totalitaire. Se battre avec eux, avec leurs différences, en y ajoutant leurs revendications et leur passif, pour en faire une force.
Bien sûr, il aurait été souhaitable que le reste de la population s’indigne du sort des ultras ces derniers années, et soit solidaire. Mais cela ne suffit pas pour refuser d’entrer dans le mouvement général de révolte contre le système.
Bien sûr, les groupes ultras refusent pour la plupart de se « mêler » de politique. Mais leur avenir est éminemment lié à des décisions politiques, des choix de société. Cela ne veut pas dire faire campagne pour un parti, mais simplement se battre pour faire tomber ce pouvoir et tout le système qui lui est lié. Exactement comme les GJ qui ont pu se retrouver sur des ronds points et dans des manifestations sans avoir voté pareil mais qui ont décidé d’unir leur force pour mettre fin à cette époque dont plus personne ne veut.
Une seule police, un seul pouvoir, une seule bataille.
Et elle commence le 14 mars à Paris. Ultras français, nous vous attendons à Paris.