« Ils veulent nous obliger à gouverner, ne cédons pas à la provocation. » Slogan, Oaxaca 2006

Le soulagement hier soir à 20h était immense, à la hauteur de l’angoisse des dernières semaines de voir le RN au pouvoir. Et c’est un bonheur rare (et donc à savourer) de voir le seum de l’extrême droite bourgeoise (qu’ils soient au RN ou dans les médias).

Mais il apparait important de poser rapidement les mots sur ce que nous sommes en train de vivre. Et se rappeler que la situation reste grave. Dramatique même.

Car hier, nous n’avons fait que sauver les meubles d’une maison qui brûle.

Le RN n’a certes pas une majorité absolue, ni même relative. Mais cela s’est fait grâce à des désistements de candidats de gauche au profit de macronistes (ou de LR). Et inversement.

Malgré cette « alliance contre nature », l’extrême droite fait le plus gros score de son histoire. Et de très loin puisque près de 140 députés siègeront à l’Assemblée. Ils étaient 89 en 2022 et seulement 8 en 2020 !

D’autant que même dans les circonscriptions où le RN a perdu en raison de désistements, il arrive souvent à 45% lors du deuxième tour. La France est plus divisée que jamais. Le racisme progresse objectivement depuis des années en France (et en Europe). Les élections ne sont que le reflet de cette réalité. Et en tant que révolutionnaire et antifasciste, il convient de combattre ce racisme bien au delà des élections. Dans la vie de tous les jours. A l’école, au travail, dans la rue…

Surtout, ces désistements et les alliances à venir pour gouverner vont renforcer le sentiment des Français ayant voté pour le RN que l’ensemble des politiques « de droite et de gauche » font en fait partie du même système. Et que seul le RN pourrait apporter un vrai changement.

Ce jeu des chaises musicales aura également permis au camp macroniste de se refaire une santé de façade, avec plus de 160 députés (quasi autant que le NFP). Alors qu’il était à 13% aux Européennes du mois dernier et à 20% lors du premier tour dimanche dernier. La Macronie, si détestée, et elle même porteuse du racisme et de l’oppression des plus faibles, reste plus que jamais dans le jeu et pourra encore peser ces prochaines années. Pour notre plus grand malheur.

Dans la série de revenants qu’on espérait pourtant bien enterrés : le PS est le parti qui gagne le plus par rapport aux législatives de 2022. Plus du double de députés ! Dont l’ancien président Hollande.

Là encore, c’est objectivement un échec pour le camp révolutionnaire et antiraciste. Car ce qui a permis une libération de la parole (et des actes) racistes, tout autant qu’une désertion de l’électorat populaire de la gauche, ce sont bien les années où le PS était au pouvoir. Il était presque enterré il y a quelques années, et il a réussi à revenir grâce à la NUPES, puis le NFP. N’attendons rien d’autre de lui (tout comme du PCF) que des trahisons politiques à des fins personnelles et de partis.

Puisqu’on ne peut pas refaire l’histoire et qu’il ne sert à rien de vivre avec des regrets, il parait essentiel de pousser et de marteler à quel point la vraie gauche de rupture ne doit désormais plus faire alliance avec la social démocratie. Même pour « faire barrage ». Elle n’a rien à y gagner à long terme. Pas même la lutte contre le racisme.

Si le tableau peut sembler bien sombre au lendemain d’une soirée « festive », ce n’est pourtant pas une gueule de bois. Mais bien un constat froid pour espérer poser les bases d’un horizon bien plus désirable.

Car en nous focalisant sur les élections et sur leurs conséquences, nous prenons le problème à l’envers.

Bien évidemment qu’il faudra toujours des partis et que même en tant que révolutionnaires, nous comprenons l’intérêt d’avoir des partis qui incarnent et défendent des valeurs humanistes, écologistes et anti capitalistes.

Mais nous sommes aussi convaincus que la rupture réelle avec ce monde qui nous étouffe et qui survit grâce aux braises de la haine et de la peur, cette rupture ne pourra se faire qu’en dehors des échéances électorales.

N’attendons pas des partis politiques, même des plus anti capitalistes, de créer les conditions d’un véritable changement de société. Celui-ci n’arrivera que lorsqu’une dynamique très forte débordera l’ensemble des cadres préexistants. Alors seulement, certains partis embarqueront dans cette nouvelle aventure. Attendre l’inverse est l’assurance de rester à quai pendant encore de longues années.

Le NFP a promis un certain nombre de choses durant cette campagne. Mais il ne fait aucun doute que sans la construction d’un vaste mouvement social, nous n’aurons rien. Or nous voulons tout. A nous de nous en donner les moyens.

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