Le procès du CRS Dominique Caffin : la fabrique de l'impunité
Le CRS Dominique Caffin était jeudi 18 novembre en procès pour avoir matraqué Mélanie à la nuque pendant une manif Gilets Jaunes (acte 23, avril 2019). Provoquant évanouissement et longues séquelles. Son acte barbare est un archétype des violences policières dont la bourgeoisie a besoin et que la justice ne condamne jamais.
En 2019, il est même décoré par Castaner. Sa réputation d’ultra violent ne fait pourtant pas de doute. Et il trimballe quelques casseroles : en 2003, plusieurs faits graves sont identifiés dans l’unité qu’il dirige : agressions sexuelles, violences contre des migrants, chants nazis. (Libération). Mais trois fois rien dans la police…
Dominique Caffin est aussi le CRS qui mène la charge lors du tabassage général du 1er décembre au Burger King (Libération), où les images de quasi tortures infligés par les flics aux Gilets jaunes à terre ont fait le tour des médias.
Hier à son procès, Caffin qui était venu avec sa tenue d’apparat « explique calmement qu’il est choqué d’être visé par une plainte et que le terme violences policières le crispe » (Action Antifasciste Paris banlieue/Twitter/lien du thread)
Bien que dans le dossier IGPN de Mélanie figure expressément qu’elle venait d’un cortège calme, le qualificatif « de situation insurrectionnelle » employé par Caffin fait figure de chèque en blanc pour justifier son arbitraire si lourd de conséquence. Le qualificatif « insurrectionnel » est une boite de pandore dans la bouche de la police et offre un angle mort monumental pour faire du sale tout en sachant que la justice n’aura rien à y redire. C’est une manière aussi de décider à postériori si la police était débordée ou non, pour justifier après coup de l’emploi complétement disproportionné de la force.
« – Je ne sais pas si elle est personnellement violente. Mais elle est dans le groupe. Je ne l’ai pas vu jeter de projectile. Mais elle était là pour entraver notre manœuvre. Et elle a un sac à dos. - Et ? Demande à son tour, l’avocat de Caffin. - Les projectiles ne sortent pas de nulle part. L’individu présentait un danger potentiel.» (live tweet de David Dufresne)
Des termes et accusations totalement subjectives faits par dessus la jambe qui ne seront pas examinés pour en démontrer le caractère d’auto persuasion mensongère, tellement propre au métier de policier.
« L’audience a duré cinq heures. Un cas d’école de la fabrication de l’impunité et du déni, sous l’œil complaisant du Parquet, et d’au moins un des trois juges (sachant qu’un dormait à moitié, ça nous en laisse un, une en l’espèce, à peu près bien). » (David Dufresne)
Ce procès était donc un simulacre de justice. Mais qu’attendre de plus ? Au moins on pourra se dire que ce Caffin aura du trainer sa carcasse pour s’expliquer devant des juges grâce à la persévérance de Mélanie. Au lieu de rester tranquillement chez lui ou même d’aller tabasser des gens comme c’est l’usage qu’il fait de son métier, il a du venir s’expliquer, son costume d’apparat de policier ne trompant que le regard d’une justice partiale et bourgeoise reconnaissant dans la barbarie de Caffin l’expression de la violence qui est nécessaire pour maintenir un ordre inégalitaire.
Le verdict sera donné le 7 décembre.
PS : Pour un portrait plus complet de cet officier des forces de répressions françaises :
https://desarmons.net/2019/10/02/le-zele-agressif-de-dominique-c-alias-go-crs/
EXCUSES AUX GJ - Lettre anonyme
Voici une lettre d’un GJ que nous avons reçue hier en messagerie et que nous avons décidé de vous relayer à l’occasion des 3 ans du mouvement
Trois ans.. Si loin, si proche.
Quand je repense aux premiers actes GJ, des frissons me prennent. Ce fut l’un des moments les plus forts de ma vie. Des souvenirs dingues. Des rencontres. Et l’espoir ! Pendant plusieurs semaines, tout nous semblait possible. Changer la société, changer nos vies.
Mais j’ai aussi d’énormes regrets et un vrai sentiment de gâchis : je m’en veux de ne pas avoir été assez loin, de ne pas avoir pris plus de « risques » lors des actes où cela aurait pu basculer.
Quand je pense aux milliers de GJ qui ont été blessés ou qui ont fait de la prison, je me dis que je n’ai pas été à la hauteur. Que j’aurais du engager mon corps et ma vie encore plus.
J’étais présent dès le premier acte. J’ai participé à plus de 100 rassemblements GJ en trois ans. J’ai monté des barricades, j’en ai enflammé. J’ai été en première ligne. J’ai participé à des manif sauvages extrêmement déterminées, à des envahissements de lieux (publics et privés), à des occupations. A plusieurs moments, j’aurais pu être interpellé, condamné et/ou blessé. On pourrait donc considéré que « j’ai fait ma part ».
Mais non, à y réfléchir, je n’ai pas fait tout ce que j’aurais pu. Et je le regrette. Et je m’en excuse auprès des milliers de GJ qui eux, sont allés au bout de leur rêve, et l’ont payé au prix fort.
Car aujourd’hui, quand je vois l’état de notre société, comment Macron et sa police ont réussi à écraser l’espoir d’une révolution populaire, et que seules les pulsions réactionnaires semblent encore audibles, je me dit une chose : s’il avait fallu que je fasse quelques mois de prison ou que je sois blessé pour que l’issue du mouvement débouche sur un renversement du système, je l’aurais fait. Sans hésiter.
Évidemment, je n’ai pas la prétention de penser que mes actes auraient changé le cours de l’histoire. Sauf qu’on sait que plus de 4 000 Gilets Jaunes ont été blessés et plus de 3 200 condamnés. On peut donc estimer que près de 10 000 citoyens ont payé, d’une façon ou d’une autre, le prix de cette révolte. 10 000. C’est énorme. Mais on sait aussi qu’on était au moins cinq à dix fois plus à être prêts à presque tout pour voir le mouvement aboutir à la chute du régime et du système. Or, si dans ces 30 000 à 50 000 Gilets Jaunes déters, qui ont eu la chance de ne pas subir les conséquences de la répression, nous avions été 10 000 de plus à pousser d’un cran notre engagement, et ce dans les actes les plus insurrectionnels, alors oui je pense que l’issue aurait pu être différente.
On ne vit pas avec des regrets.
Mais je tenais à profiter de ce troisième anniversaire du plus beau mouvement populaire que j’ai connu de ma vie pour remercier ceux qui y ont participé, qui s’y sont engagés, corps et âme. Les remercier, et m’excuser de ne pas avoir été aussi loin que ce que j’aurais finalement voulu, et pu faire.
Un million de logements vides... On squatte qui ?
EN FRANCE, 1,1 MILLION DE LOGEMENTS SONT VIDES DEPUIS AU MOINS DEUX ANS
Il y a quelques jours, les chiffres des logements privés vides des communes françaises ont été mis en ligne en accès libre par le gouvernement.
On y apprend qu’au 1er Janvier 2019 à Toulouse, 29195 habitations n’étaient pas occupées, soit 11.4% du parc privé, dont 3951 d’entre elles depuis plus de deux ans.
24 183 à Lyon (9.4%), 13290 à Nantes (8.9%), 108532 à Paris (9.89%), 46382 à Marseille (12.11%), 13814 à Strasbourg (11.6%), 21571 à Nice (9.9%), 18 440 à Montpellier (12.8%), 17348 à Lilles (15.3%)…
Mais qui peut se permettre de garder ces 1.1 millions de logements vides ?
Dont 300 000 dans les zones tendues, ces zones où l’offre ne peut pas répondre à la demande et où l’on connaît les pires galères de logement.
Des petits propriétaires qui proposent un bien à la vente sans trouver d’acheteur ?
Des héritiers en attente du règlement d’une succession ?
De gros propriétaires suffisamment friqués pour oublier qu’ils pourraient louer ?
Ou de gros bailleurs qui jouent la spéculation immobilière ?
Belle hypocrisie en tout cas du gouvernement, qui pointe du doigt le privé en ne communiquant que les données de leurs parcs.
Pas très joli de la part du premier acteur et réalisateur de la crise du logement…
Car même si l’Etat se fait discret sur le sujet, on se souvient qu’en 2015 les journalistes Denis Boulard et Fabien Piliu avaient dévoilé que l’Etat détenait 11.1 millions de mètres carrés de logements et bureaux vacants.
Bailleurs sociaux, église, état… tous jouent ce petit jeu de la propriété privée inoccupée.
Un jeu sordide et inhumain quand on sait que 4 millions de personnes sont mal logées ou non logées en France.
Selon les chiffres de la Fondation Abbé Pierre
300 mille personnes vivent dans la rue, un chiffre qui a triplé en 20 ans…
En 2020, 587 SDF sont officiellement morts dans la rue ou dans des abris de fortune selon le Collectif les Morts de la rue. Qui admet que ce nombre est loin d’être exhaustif.
Un jeu criminel donc.
Alors, on squatte qui ?
GRAMSCI : CRISES & MONSTRES
« La crise consiste justement dans le fait que l’ancien [monde] meurt et que le nouveau ne peut pas naître. Pendant cet inter-règne, on observe les phénomènes morbides les plus variés. » Antonio Gramsci
Antonio Gramsci est un philosophe italien marxiste qui a notamment développé la thèse de l’hégémonie culturelle et co-fondé le parti communiste italien. Le philosophe italien a toujours lutté contre les figures et les pouvoirs fascistes. Ceux qui l’ont fait croupir en prison pendant près de 20 ans afin « d’empêcher son cerveau de fonctionner ».
Mais c’est justement en prison que Gramsci a développé la plupart de ses hypothèses. Il a touché du doigt les conditions nécessaires à l’avènement des révolutions en Europe de l’ouest avec le développement des thèses sur l’hégémonie culturelle.
La lutte des classes, dit Gramsci, doit désormais inclure une dimension culturelle ; elle doit se poser la question du consentement des classes subalternes à la révolution. La force et le consentement sont les deux fondements de la conduite des Etats modernes, les deux piliers d’une hégémonie. Quand le consentement vient à manquer, les conditions sont réunies pour le renversement du pouvoir en place.
Gramsci a également fait le constat vérifiable au présent. Du fait de nos temps de crises, économique dans un premier temps (2007), terroriste dans un second (2014), sanitaire et écologiques d’aujourd’hui et de demain.
Que lors de ces périodes, le pouvoir en perdition tente de se maintenir à flot et use pour ça de toutes les stratégies. Il ne lâche rien et empêche ainsi le nouveau monde d’apparaître. Il n’arrive plus à obtenir le consentement de sa population et fait face à des tentatives de débordement, de renversement et entre dans un processus de fascisation.
Ainsi surgissent les monstres.
Alors même que Zemmour tente de récupérer les idées de Gramsci en le citant sans honte là où il le peut, nous devons l’appréhender en tant que symptôme de l’époque, ou pour reprendre l’expression de Gramsci, comme « phénomène morbide ». Il n’est que la face publique du processus de fascisation actuel que seul un antifascisme populaire, solidaire, radical pourra contrer en créant les conditions propices à l’avènement du nouveau monde.
☀️ Du soleil en automne ☀️
Pourquoi il n’y aura pas de saison 2 du mouvement des gilets jaunes, mais bien une nouvelle série, au scénario complètement différent. Un blockbuster qui scotchera tout le monde.
Depuis environ 48h, les appels circulent partout pour un retour massif des gilets jaunes trois ans après le début du mouvement. Des appels à l’aide de certain.e.s, des envies d’y retourner pour d’autres. Le gilet jaune est depuis deux jours devenu la cape du héros déchu qu’il doit revêtir au plus vite. En quelques heures la machine de guerre s’est emballée. Le #GiletsJaunesSaison2 en tendance Twitter, des figures du mouvement invitées sur des plateaux télés, des articles se multipliant dans les médias.
Mais disons le clairement, une « saison 2 » des gilets jaunes n’est ni possible, ni souhaitable.
🔶 PLUS RIEN NE SERA JAMAIS COMME AVANT
Depuis le mouvement des gilets jaunes, et dans un régime sanitaire écrasant, les mouvements se sont multipliés dès qu’ils le pouvaient, comme ils le pouvaient. En 3 ans nous avons connu pas moins de 6 mouvements massifs, aux formes et aspirations diverses. Du jamais vu.
▶️ Les mouvements antiracistes (islamophobie et négrophobie) et contre les lois liberticides ont ramené dans la rue des dizaines de milliers de jeunes, manifestant parfois pour la première fois et avec une détermination rare contre le racisme, la police et la surveillance de masse. Qui ne se souvient pas de cette foule devant le tribunal de grande instance, ou cette manifestation terminant place de la bastille, quand la BRAV-M fut complètement acculée.
▶️ Le mouvement contre la réforme des retraites a réussi a réactiver les machines syndicales et à les réinscrire dans la volonté du mouvement de masse. Bien que celui-ci fut stoppé avec l’arrivée inévitable du confinement, il a été une période où beaucoup ont renoué avec la grève, les blocages, les démonstrations de force. Tous les corps de métiers y étaient représentés. On se souvient notamment des pompiers en grève, des mois durant en première ligne, et dont la détermination a permis de dévoiler le vrai visage de leur corporation voisine : les flics.
▶️ Le mouvement des occupations de théâtres qui a eu lieu partout en France, jusque dans les théâtres les plus reculés de la Drome, il a permis de mettre en évidence la nécessité d’avoir des espaces où s’organiser. Les théâtres ont essayé de devenir les ronds-points de 2018. Des lieux où l’on se retrouve, où l’on mange, où l’on s’organise, où l’on échange, où l’on crée du commun. Des lieux désirables où l’on se confronte au réel.
▶️ Le mouvement contre le pass-sanitaire lui, a réussi à mettre dans le mouvement tout un tas de gens que personne n’attendait. Parfois des indésirables disons-le clairement. Mais aussi beaucoup de confusions qui auraient le mérite d’être clarifiées. Le pass-sanitaire comme dispositif de contrôle, comme outil de précarisation de beaucoup de professions. C’est ce que nous devons retenir.
▶️ Les derniers rapports du GIEC n’ont fait que grossir les rangs des militant.e.s défendant le vivant. Contre l’artificialisation des terres, les projet écocides à l’image des aménagements pour les JO 2024.
▶️ Les luttes féministes n’ont cessé de s’opposer au système patriarcal, aux violences sexistes et sexuelles dont la nomination du ministre de l’intérieur, Darmanin en a été le visage le plus exacerbé.
▶️ Les luttes LGBTQ ont continué de se diffuser, dans des prides radicales et sur les réseaux sociaux.
Toutes ces luttes se font échos entre elles, elles s’entremêlent et font face à un état et une police qui perpétue et accentue aussi bien les oppressions racistes, sexistes, LGBTophobes et précarise une population déjà à genoux
🔶 TENIR ENSEMBLE
Ces mouvements ont tous eu lieu en temps de pandémie, d’état d’urgence, de confinement, de couvre-feu. Alors que nos vies sont dictées par les discours napoléoniens d’un Macron plus arrogant encore que n’importe quelle star d’Hollywood.
Nous avons tenu la pandémie, maintenu et consolidé les liens sociaux là où le pouvoir cherchait à nous isoler.
Alliant la réalité du risque sanitaire et la nécessité de résister aux attaques anti-sociales et liberticides. Nous avons tenu, il est désormais temps de déborder.
A ce stade du texte, vous devez sûrement voir ou je veux en venir. Il serait inutile et prétentieux de croire que le mouvement des gilets jaunes reviendraient comme ça, en claquant des doigts, à l’appel de quelques figures et quelques comptes Twitter. Il ne peut y avoir de saison 2, car les suites sont toujours plus fades. Même si le gilet reviendra sur les épaules de nombreuses personnes dans le mouvement qui vient. Même si les ronds-points redeviennent les points centraux de la mobilisation, celle-ci ne pourra être « le mouvement des gilets jaunes ». Il sera et doit être plus vaste, plus diversifié, sans doute plus déterminé.
Il y aura les gilets verts, les gilets noirs, les gilets rouges dans un mouvement arc-en-ciel, ingouvernable. Il y aura du partage de pratiques, de modes d’actions. Certain.e.s occuperont quand d’autres bloqueront. Certain.e.s feront de grandes cantines et de délicieux barbecues ravitaillant les émeutiers fatigués. Tout ce que nous avons appris ces dernières années, qui que nous soyons, nous en tirerons profit. Nous avons tissé des liens. Faisons-en des nœuds.
L’économiste Frédéric Lordon disait déjà au printemps 2018, quelques mois avant le mouvement des gilets jaunes et pendant la grève des cheminots et l’occupation des universités :
💬 « Il faut que tous sachent qu’ils ont les moyens de faire dérailler le convoi. Ce que nous voulons ? C’est le mouvement de masse. Si l’offensive est générale, nous voulons le débordement général. Il faut dire à tous ceux qui se sentent dans le malheur qu’il y a une issue. Luttez, luttons, c’est le moment. »
🔶 MOURIR PEUT ATTENDRE
Les raisons du mouvement qui s’annonce sont multiples, et recoupent les raisons des différents mouvements sociaux de ces trois dernières années. Pour beaucoup, pris à la gorge par l’austérité, la précarité, les multiples oppressions systémiques ou la destruction des libertés, il s’agit bien de prendre la rue ou de mourir. Et comme nous le dit si bien le dernier 007, Mourir peut attendre, alors prenons la rue.
▶️ Les augmentations des carburants, du gaz, de l’électricité, mais également du blé et des matériaux comme le bois ou l’acier.
▶️ Les réformes anti-sociales, précarisant d’avantage. (Assurance chômage / Retraites)
▶️ Les lois liberticides : séparatisme, sécurité globale, état d’urgence et pass sanitaire
▶️ Les pleins pouvoir à une police et un Etat de toute les répressions, de toutes les oppressions
▶️ La multiplication des projets d’artificialisation des terres (JO 2024, Port du Carnet, Triangle de Gonesse)
A qui ne voit pas du commun dans le combat à mener contre les gestes du pouvoir devrait lui être offert une consultation chez l’ophtalmo. Le simple fait que ce soit les mêmes qui aient le pouvoir de décision sur l’ensemble de ce qui vient d’être évoqué devrait suffire. Mais il y a bien du commun entre le social, le vivant, et les libertés. Tryptique interconnectée. Car affectant directement nos corps.
🔶 EN FINIR AVEC LA MASCARADE
Pour couronner le tout, nous rentrons dans la grande mascarade de 2022 et soyons en assurés, il n’y a à chercher en aucun.e des candidat.e.s une alternative désirable à ce que nous vivons.
La classe politique est à bout de souffle, elle gesticule. Regardons-la de loin, pour pouffer de rire de temps en temps lors d’un débat folklorique entre un Zemmour et un Mélenchon.
Mais ne tombons pas dans le piège qu’imposent ces moments de bouffonnerie. La seule chose qui peut nous sortir d’une telle situation, c’est Nous, ensemble et dans la rue.
💬 « L’évidence a changé de camp – on se demande comment on a pu y croire. Ils n’ont plus pour eux que le vacarme de la télé et les bottes des CRS. Presque rien n’a changé, mais ce n’est plus comme avant. […]
Ce n’est qu’à partir de l’intelligence de ta situation que tu trouveras les prises pour t’emparer de 2022, pour inventer les milles agencements insoupçonnables, intimes, collectifs, langagiers, un souffle, un refus, une foule, qui tenteront d’enrailler effectivement cette mauvaise farce. Si c’est pas pour cette fois-ci, ce sera pour l’après, ou pour la prochaine. Tu ne seras pas seul, car l’évidence que cette mauvaise farce en est bien une rend infiniment plus partageables toutes les tentatives pour la déjouer. Frappe au hasard, tu trouveras. », En finir avec 2022, Lundi Matin
Il n’y aura pas de saison 2 des gilets jaunes. Il y a une nouvelle série qui va sortir, au scénario complètement différent. Un blockbuster qui scotchera tout le monde. Pour y prendre part, il va falloir arrêter de regarder Squid Game et foncer sur le plateau de tournage le plus proche de chez toi. En bas de chez toi. Dans la rue.
Nous n’avons pas la date de sortie précise. Certaines disent que c’est mieux de garder la surprise. Tenons nous prêts, il y aura peut-être un beau soleil cet automne ou cet hiver.
La question identitaire : le grand hold up
A l’heure où les prix de l’essence, du gaz et des matières premières ne cessent de flamber, où les étudiants recommencent à aller pointer à la banque alimentaire, il parait complètement fou qu’une grande part de la population continue de se laisser berner par les questions identitaires alors qu’on se fait littéralement plumer par les politiques néo-libérales autoritaires.
Il parait fou qu’on doive encore se battre contre ceux qui en redemandent et qui en plus réclament le supplément raciste ! Comment continuer de croire que c’est en expulsant les immigrés et en réduisant les allocations des plus pauvres qu’on sortira des crises engendrées par le capitalisme ? Comment donner crédit à la préférence nationale alors qu’il est d’une plate évidence que la discrimination des non français de papier ne rendra jamais la misère et la précarité ambiante plus soutenable. Pas même une seule seconde.
Nous pensons que la question identitaire est une peur que le bourgeois en voie de déclassement essaye de transmettre au plus grand nombre. Le but : retrouver son emprise capitaliste d’antan, sa petite baronnie locale, son petit pouvoir seigneurial, son influence perdue qu’il avait sur tout un tas de moeurs. Pour résumer, il veut retrouver la peur qu’il incarnait autrefois.
Là où le capitalisme mondialisé ne lui a laissé que les miettes du pouvoir et la seule gestion de la flicaille, l’identitaire se sent lésé et cherche une manière de redorer son blason. Il n’a alors de cesse de parler de déclin civilisationnel. Un concept assez fourre tout qui pourra toucher monsieur et madame toutlemonde qui sent bien que tout fout le camp, qu’on marche sur la tête, ou que le monde ne tourne pas rond.
La vision décliniste donne une lecture simpliste dans un monde où on ne comprend plus rien : « si rien ne va plus, c’est à cause des étrangers qui nous grandremplacent et nous font perdre notre identité ». A ce délire, il faut rajouter la phobie des homosexuels, lesbiennes, transgenres, queers ou intersexes. Et la détestation des femmes qui dénoncent une société encore inégalitaire basée sur le patriarcat. Bref, l’identitaire est une bête agonisante et donc dangereuse. Doublé d’un coté par ses amis capitalistes qui gomment les frontières pour le business et doublé de l’autre par les minorités qu’il ne peut plus empêcher de parler comme jadis. Pour se dépatouiller de ça, l’identitaire a hérité d’une bonne vieille technique, celle par laquelle toutes les révolutions ont mal tourné : La contre révolution.
Bientôt trois ans après le soulèvement populaire des Gilets Jaunes qui a fait date dans l’Histoire, il est plus qu’utile de rappeler qu’après les tentatives insurrectionnelles émancipatrices, vient ensuite le temps de la contre révolution. Celle qui fit naître Napoléon après 1789, celle qui accoucha de Staline après la révolution bolchevique, celle qui débrida le capitalisme après 68. Si on suit ce fil de l’Histoire, on peut se demander si après les Gilets Jaunes, nous allons devoir nous fader Zemmour ou Le Pen…
L’Histoire est parcourue d’une volonté d’émancipation toujours trahie. Pour l’instant, les révolutions ont toujours fini cocues.
Il est plus que temps de se ressaisir et d’enrayer ce hold up à ciel ouvert. Non, on ne vivra pas dans le bonheur en laissant les identitaires museler les minorités et faire du capitalisme à la papa. Vu les enjeux devant nous, l’extrême droite devrait systématiquement se faire dégager du chemin pour que nous puissions aller droit au but boxer la politique de Macron.
De la crise du covid, nous avons tiré un enseignement, celui que notre liberté était indexée sur notre productivité. Dès lors que nous n’étions plus utiles à l’économie pour cause de pandémie et de confinement, nous avons vu les couvres feux, les attestations d’auto-flicage et les interdictions de se balader en forêt ou sur la plage rendre coupable notre liberté de circuler. Nous avons vu que les principes fondamentaux de la démocratie et des droits humains étaient une fine couche de vernis, quelque chose que l’économie se réservait le droit de suspendre. Surement par peur qu’un monde auto-organisé surgisse. Un monde qui fait sans cette économie, ou qui la détourne.
Si nous nous étions sentis libres par le passé de pouvoir voyager, rien qu’hors de sa ville ou de son département ou libres en ayant des week ends, il faut nous rendre à l’évidence que cela dépendait avant tout de notre aptitude à être des portefeuilles en mouvement. Pendant le premier confinement, même ceux qui s’étaient affranchis de cette cruelle réalité en vivant en camion sans beaucoup dépenser ont vite été rattrapés par la réalité répressive.
Gouverner, que ça soit pour la droite ou « la gauche », ça a toujours consisté à faire de nous des facilitateurs de flux. Si toutes les contestations sérieuses en arrivent à bloquer les flux, par des grèves, des blocages ou des sabotages, ce n’est pas un hasard. Ceux qui s’en plaignent finiront un jour ou l’autre par s’apercevoir que leurs chaines se raccourcissent.
Nous avons acté que le capitalisme et la gestion des crises qu’il produit a encore beaucoup de misère et d’entrave à nous imposer. Au rythme où il se contracte, par sa perte de croissance et la raréfaction des ressources qu’il pille, il ne faut pas douter une seule seconde que ses restructurations à venir seront violentes. Aussi, il parait évident que les pénuries à venir, qu’elles soient dues au climat, à l’économie de marché, ou à d’autres pandémies, occasionneront des rationnements, et des mesures liberticides tout autant, voire plus violentes que celles qu’on a connues. Les stratégies du capitalisme consisteront toujours à nous tenir la tête sous l’eau pour que surtout, nous ne puissions nous organiser sans lui. Et nous entendrons toujours la même chanson à chaque élection : « soit moi, soit le fascisme ».
Le présent et l’avenir du concept de gouvernement est un tandem entre le néo-libéralisme et le fascisme. Le capitalisme, aujourd’hui seul au monde, ne permet que ce coté là de l’échiquier. Il nous parait impossible qu’un jour, nous voyions arriver un gouvernement de vraie gauche ayant comme programmatique la chute du capitalisme et l’égalité entre tous les êtres humains.
Il paraît par contre plus probable qu’un jour, nous éliminions les tentatives identitaires qui divisent les gens qui pourtant partagent les mêmes galères et que ce jour, nous allions toutes et tous remettre le couvert pour faire une révolution qui finira véritablement d’abolir les privilèges, d’abolir les inégalités. Nous ne sommes pas des stratèges politiques et n’avons par conséquent que des rêves. Mais la certitude qu’on peut s’organiser à grande échelle et au delà des frontières sans se laisser crever de faim, sans se faire la guerre civile, tout en assurant des logements pour tous et le partage des savoirs et des cultures… Cette certitude est grande.
Et non, abolir le capitalisme ne nous fera pas revenir à l’âge de pierre. Il est évident que nous pourrons subvenir dignement à tous nos besoins sans recourir à un système d’enrichissement massif de quelques uns au détriment de tous les autres.
Ayant fait ce constat, il est hors de question de laisser prospérer ceux qui incitent à se regarder le nombril de l’identité pendant que le train d’une mort sociale nous fonce droit dessus.
Ceci est un message destiné à toutes celles et ceux qui doutent. Nous les invitons à faire un pas de coté. A prendre de la hauteur et à s’organiser pour que l’Histoire ne se répète pas inlassablement à la faveur des salauds. Il nous revient la tâche de créer un monde auto-organisé, qui ne soit pas gouverné, dans lequel « être un puissant de ce monde » ne veut rien dire. Sinon, il y a fort à parier que notre futur sera un monde à la Mad Max.
La fresque hommage à Steve effacée : une amnésie politique
La fresque hommage à Steve vient d’être recouverte de peinture noire.
Depuis 2 ans elle permettait aux passants de ne pas oublier la violence de la répression policière durant cette nuit de fête de la musique, le 21 juin 2019 à Nantes.
On ne s’éternisera pas sur les raisons de la disparition de la fresque, Nantes Révoltée les explique très bien dans son article.
Mais on déplore cette disparition, totalement assumée par le collectif Ju’Steve qui l’explique comme un choix stratégique « en accord avec la famille » afin « qu’elle ne soit plus ni dégradée ni politisée ».
On peut le comprendre. Voir des tags fascistes à coté d’une représentation de Steve est choquant. Mais les tags fascistes ne font pas le poids face au symbole de résistance.
La mort de Steve est politique. Qu’on le veuille ou non. Avec ou sans fresque pour le rappeler, elle est une preuve de plus que l’ordre policier veut primer sur la vie humaine. Qu’il serait normal qu’une décision policière arbitraire tue un jeune homme qui faisait la fête dans un endroit qui ne gêne personne. Elle est le résultat d’une politique répressive où l’usage de la force n’a pas de limites quand il s’agit de soumettre le peuple et de débrancher ce qui nous rend vivant.
Ils veulent nous faire marcher au pas, nous on continuera à danser. Nous ne voulons pas céder au mouvement de recule qui accepterait ce climat de peur.
Cette normalisation assassine du comportement des corps ne doit pas passer.
La fresque politique pour Steve qui a été recouverte tenait la dragée haute à tous ceux qui ont une responsabilité dans sa mort. Elle était une force pour tenir à distance le climat fasciste de notre époque qui pourrait reproduire un tel drame.
Elle faisait que nous ne baissions pas la tête et fédérait toutes celles et ceux qui face aux crimes fascisants de la police ont besoin de se serrer les coudes. Toutes celles et ceux qui savent que c’est en parlant haut et fort et ensemble qu’on repousse les violences systémiques de l’Etat. Qu’on esquisse les contours de notre liberté. C’est de ça qu’on a besoin. D’un rapport de force. C’est cela qui nous protège et nous fait avancer.
PS : Un peu plus loin, un portrait de Steve a été peint sur fond bleu. Seul son prénom y figure.
« Il ne faut pas être grand sage pour se douter que la mairie est plus à l’aise avec le nouvel hommage qu’avec l’ancien » explique la journaliste Marion Lopez.
La rue est-elle une impasse ?
Depuis 10 semaines, des centaines de milliers de personnes défilent dans les rues de petites, moyennes et grandes villes françaises, pour refuser le pass sanitaire. Malgré l’ampleur de la mobilisation, le pouvoir n’est pas prêt de fléchir. Il fut un temps, pas si lointain, où des mobilisations sociales importantes pouvaient annuler des réformes impopulaires.
Mais depuis plusieurs années, le pouvoir ne cesse de rappeler que « ce n’est pas la rue qui gouverne ». Lancée par Raffarin en 2003, cette maxime a depuis été reprise par Sarkozy en 2012 (La rue n’a jamais fait la loi) puis Valls en 2016 (La démocratie, ce n’est pas la rue). Macron est sans aucun doute le président qui aura appliqué cette maxime de façon radicale. En quatre ans, le président de la Startup Nation a connu au moins six mouvements sociaux d’ampleur exceptionnelle (détail en fin d’article). Sans jamais changer sa politique.
Dans l’histoire française, la prise en compte des revendications sociales fait partie des éléments de la démocratie. Il ne s’agissait pas d’élire, puis de laisser un pouvoir faire ce qu’il voulait pendant 5 ou 7 ans. Manifester faisait partie des outils d’expression… et de pression.
Mais le pouvoir a rapidement compris qu’il avait tout intérêt à ignorer la colère populaire. Que s’il restait inflexible, semaine après semaine, mois après mois, la mobilisation faiblirait forcément. Et le mouvement s’estomperait « naturellement ». Qu’importe le mouvement, son ampleur et sa popularité
Face à cela, la pression et le rapport de force pouvait venir d’une mobilisation offensive, mettant le pouvoir devant une situation qui l’oblige à « réagir ». Ce n’est pas un hasard si le seul petit « pas » que Macron a fait en 4 ans fut au moment de la séquence la plus insurrectionnelle des GJ. Ce ne fut pourtant pas le moment où le plus de Français furent dans la rue (il y a eu plus de monde contre la réforme des retraites par exemple).
Mais pour annihiler toute nouvelle possibilité de rapport de force compliqué pour le pouvoir, Macron a choisi de militariser le « maintien de l’ordre » des manifestations. Les manifs sensibles pour le pouvoir sont ainsi devenues de véritables nasses mobiles, où les manifestants sont totalement encerclés de milliers de policiers/gendarmes. Aucun autre pays au monde n’offre un tel spectacle, véritable simulacre de démocratie. Une prison à ciel ouvert pour « manifester ses droits ».
Résultat ? Il n’est plus possible de peser sur les décisions du pouvoir en mobilisant massivement. Puisque le pouvoir s’en fout. Et sait que s’il ne réagit pas, le mouvement finira par s’essouffler. Et il n’est plus possible de peser en mettant le pouvoir en difficulté dans la rue puisque chaque manif déclarée est une nasse. Et que tout appel non déclaré est violemment réprimé : arrestations, charges, amendes, GAV, LBD, lacrymo, BRAV M…
Face à ce constat d’échec, nous n’avons clairement pas de solution miracle. Mais reconnaitre l’impasse des manifs déclarées permettrait déjà de tenter de construire différemment les mobilisations futures.
Qui, parmi ceux qui sont descendus dans la rue depuis 10 semaines contre le pass sanitaire, pense encore que continuer ces manifs peut infléchir la position de Macron ? Qui pense que les réformes ultra libérales et sécuritaires du pouvoir peuvent être stoppées par des mobilisations futures ?
Pour ceux qui veulent lutter contre ce monde et qui ne se voilent plus les yeux sur cette impasse, il n’y a pas d’autre choix que de prendre acte de la situation et de concevoir des parades. Pour créer un nouveau rapport de force qui mette réellement le pouvoir en difficulté. Que ce soit de façon symbolique ou non.
***MACRON. 4 ANS DE DÉNI****
– Fin 2018 : les Gilets Jaunes évidemment, avec plus de 400 000 manifestants sur les premiers actes. Des dizaines d’actes, pendant près de deux ans et 40 000 rassemblements ! C’est énorme et du jamais vu.
– 16 mars 2019 : 350 000 personnes dans les rues pour la Marche pour le Climat
– 05 décembre 2019 : près d’un million de personnes contre la Réforme des retraites, avec de nombreuses autres manifs massives les semaines suivantes
– 13 juin 2020 : 30 à 50 000 personnes rien qu’à Paris contre les violences policières et le racisme.
– 28 novembre 2020 : Près de 500 000 personne dans toute la france contre la loi Sécurité Globale, avec de nombreuses autres manifs massives les semaines suivantes.
– 07 aout 2021 : Plus de 500 000 personnes dans toute la France contre le pass Sanitaire. Plus de 10 samedis consécutifs de mobilisation avec plus de 100 000 personnes dans les rues.
Mise au point : La position de CND vis à vis de la pandémie
STOP
PRENONS UNE MINUTE POUR UNE MISE AU POINT
Dans une période de grande confusion, prendre position est toujours compliqué. Notre farouche opposition au pass sanitaire semble avoir brouillé la clarté de notre positionnement sur la question du Covid et du vaccin. Voici donc quelques précisions.
Déjà, nous ne nous positionnons pas en fonction des prises de position du pouvoir (que l’on combat clairement). Au Printemps 2020, alors que le gouvernement estimé que le port du masque était inutile pour la population (voir contre productif), nous avons clairement et largement clamé qu’il fallait des masques, pour tous, et au plus vite. Lorsque les masques sont arrivés et que le pouvoir a décidé qu’il fallait les rendre obligatoire, nous n’avons pas changé d’avis sur l’utilité et l’importance du masque, notamment en lieu clos.
De la même façon aujourd’hui, si nous maintenons que le pass sanitaire est une aberration et un énorme danger, nous restons convaincu que la vaccination est l’un des moyens les plus efficace pour limiter la pandémie. Et ce, même si Macron et Véran le pensent aussi !
Bien que n’étant ni médecins, ni scientifiques ( ni ne travaillant pour : Bill Gates, Soros, le Nouvel Ordre Mondial, Macron, Satan ou encore Enquête Exclusive, soyez rassuré.es ), nous pensons que le VACCIN est un outil, pas le seul, mais INDISPENSABLE, pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 qui pourrit nos vies depuis un bon bout de temps.
Alors bien sûr, nous n’avons pas fait médecine, et sommes également conscients des travers des lobbies pharmaceutiques, tout sauf philanthropes, nous n’avons pas pour mission de prouver ou d’imposer notre avis mais il nous parait important de clarifier une bonne fois pour toutes ce point.
La question du pass sanitaire est éminemment politique, et nous y sommes farouchement opposés. Nous continuerons à le combattre, comme un énième sujet de lutte sociale, aux côtés de tous les autres sujets que nous développons régulièrement ici.
La question du vaccin est essentiellement scientifique, et le choix de l’utiliser participe d’un choix intime, bien qu’en lien avec la question de la solidarité et du collectif, et nous y sommes profondément favorables. A cela s’ajoute notre conviction que la levée des brevets est un impératif moral, notamment vis à vis des populations les plus précaires. La santé ne devrait pas être une variable de profit.
Les fossoyeurs de liberté
La situation ne fait aucun doute : la liberté est violemment attaquée par les mesures de passe sanitaire imposées par le pouvoir. La France s’engouffre toujours plus dans la voie d’une société de contrôle, inspirée du modèle chinois (voire israélien). C’est grave et nous le combattons sans ambiguïté depuis le début.
Mais, dans le même temps, la liberté est également attaquée sur l’autre front, de façon plus pernicieuse, mais tout aussi dangereuse. Sur le front de sa « défense ». Des personnalités et partis politiques de droite dure, se sont emparés du combat contre les restrictions sanitaire pour en faire un levier électoral (coucou 2022). Ces Phillipot et Dupont Aignan, sont en train d’importer une mouvance américaine qui n’avait jusqu’à présent pas d’emprise en France : le libertarisme de droite.
Sans faire dans l’encyclopédique, le libertarisme (de droite, majoritaire aux USA) est la promotion d’une liberté individuelle absolue. L’idée que partout où l’État légifère, cela se fait au détriment de la liberté. Moins il y a d’État, mieux se porte l’humanité. Cette « philosophie » est bien évidemment très fortement liée à la liberté économique et financière. Les libertariens américains sont ainsi fortement financés par des ultras riches et de grandes entreprises.
Pour ces gens là, il s’agit donc de promouvoir la liberté individuelle, sans aucune notion de solidarité. Aux USA, cette mouvance a pris le l’ampleur lors du combat contre la réforme de l’assurance maladie, l’« Obamacare », une mesure destinée aux plus précaires mais, qui selon eux, était totalitaire. Ils furent aussi en première ligne sur le combat contre l’imposition par l’État Fédéral de contraintes liée à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Leur credo : laissez moi m’enrichir, porter une arme, et vivre comme je l’entends. Et que chacun se démerde pour être heureux sans l’aide de quiconque.
Pour ces libertariens, toute action publique est une dérive vers le totalitarisme, et ils n’hésitent pas à utiliser les comparaisons avec le régime soviétique ou le régime nazi. Ce n’est donc peut être pas un hasard si on retrouve, en France, ce type de comparaison plus que déplacée et nauséabonde qui ridiculise les manifs anti passe sanitaire. Le problème avec la pensée libertarienne n’est pas qu’elle s’oppose à l’état. Très bien. Mais que dans le même temps, elle s’oppose aussi à toute organisation solidaire, populaire qui tente de s’autonomiser par rapport à un état qui maintient un système inégalitaire.
Cette vision de la liberté, uniquement centrée sur sa « propre » liberté, est en fait un égoïsme qui ne dit pas son nom. Cet individualisme poussé à l’extrême et présenté comme une défense de « LA » Liberté est en vérité déjà le dogme du néo libéralisme qui met en concurrence les individus les uns contre les autres. Ce qui revient à la notion d’une liberté qui finit toujours par être celle du plus fort.
Cette notion de la liberté fondée avant tout sur l’individu porte même préjudice à ses défenseurs, qui souvent issu des classes moyennes, ne tirent pas particulièrement leur épingle du jeu d’un système du chacun pour soi qui au final les destine à avoir une place sociale de soumission juste un peu au dessus des plus pauvres et à ne récolter que des miettes.
Il y aurait plus à gagner à défendre une liberté qui pense aussi le monde et la communauté, plutôt qu’une liberté qui pensent l’individu par dessus tout. Ce qui est déjà l’apanage du néolibéralisme qui opprime 99% de la planète. Dessinant plutôt un monde à la Mad Max qu’un monde désirable.
Combattre le pass sanitaire, en utilisant la notion de liberté, tout en se foutant du drame que vivent les populations les plus précaires en France et dans d’autres pays, en niant la catastrophe climatique en cours pour ne pas faire perdre des profits aux plus riches, c’est souiller la notion de liberté. C’est l’isoler dans un égoïsme petit bourgeois occidental. Ces gens là disent vouloir la disparition de l’état mais en réalité leur ennemi c’est l’état social, ils ne remettent jamais en question l’état policier. Ils ne voient pas (ou ne veulent pas voir) qu’ils défendent un ordre bourgeois : la surveillance de masse, les attaques contre le droit de manifester… n’entament pas leur liberté de petit bourgeois, et ils ne la combattent donc pas.
La liberté ne peut se vivre que si elle s’accompagne d’humanité, de solidarité et de résistance.